Le 14 décembre 2016, un groupe de réflexion livrait au public le fruit de 3 jours intenses de brainstorming consacré aux abeilles, à l’apiculture et à la pollinisation.
Pendant 3 jours complets passés à vivre ensemble et à faire connaissance, une petite centaine de personnes, originaires de 6 pays et 24 États différents, s’était réunie avec la ferme intention d’identifier les problèmes principaux auxquels font face apiculteurs, abeilles et pollinisateurs, et surtout de faire émerger les solutions possibles pour y remédier. Le lieu n’était choisi au hasard : un brin coupé du monde, ce centre d’événement champêtre et isolé à 80 km au nord de San Francisco se prêtait particulièrement bien à cette démarche de réflexion et d’échanges. Les discussions de couloir étaient tout aussi riches que les tables rondes. Ces échanges étaient enrichis par la variété des profils et compétences réunies : chercheurs et techniciens aux spécialisations diverses (virus, paysages naturels et agricoles, alimentation, écotoxicologie, maladies, produits de la ruche, etc.), apiculteurs de 1 à 15.000 ruches, activistes d’ONG, acteurs de la société civile…
Tout est parti d’un éditorial de Mark Winston dans la revue Bee Culture Magazine au printemps 2015. Dans cet éditorial, cet expert en pollinisation et biologie de l’abeille faisait part de la nécessité de mêler enfin les deux disciplines qu’il connaît le mieux : les abeilles et le dialogue. Professeur à l’université canadienne Simon Fraser, Mark Winston y a dirigé pendant 12 ans le Centre pour le Dialogue, qui réunit des groupes de toutes sortes dans l’optique de faire émerger de nouvelles idées susceptibles de changer le monde de demain. Mark Winston définit le dialogue comme « une discussion concentrée entre des personnes égales. Cela apporte plusieurs manières utiles de travailler ensemble, encourage la compréhension mutuelle entre différents points de vue et conduit à des résultats stables et résilients. Un dialogue productif se caractérise par un esprit de curiosité, un intérêt pour l’apprentissage permanent par et avec les autres, et une volonté d’évoluer soi-même. Au lieu d’argumenter, de convaincre et de défendre ce que l’on sait déjà, le dialogue encourage les individus à explorer l’inconnu : découvrir différentes expériences et valeurs, aussi bien que des points d’accord et de désaccord ».
Mais ces belles idées auraient très bien pu rester à l’état d’éditorial inspirant sans le travail remarquable d’une apicultrice californienne qui contacta Mark Winston et se chargea d’organiser l’événement 18 mois plus tard, Bonnie Morse.
Après avoir été sensibilisés aux principes du dialogue, les participants de Bee Audacious étaient réunis dans des groupes d’une dizaine de personnes pour réfléchir autour de thèmes variés pendant une trentaine de minutes. Ces groupes étaient constamment re-mélangés de manière aléatoire de manière à brasser les profils et points de vue. Dans un soucis constant de produire des résultats, chaque participant se devait d’intervenir au moins une fois, et des synthèses des échanges étaient soigneusement élaborées. 10 grands experts plus brillants les uns que les autres étaient en charge d’animer ces tables rondes – sans trop intervenir et influencer toutefois – et de faire part en fin de séance du déroulement des échanges et les idées les plus audacieuses.
La synthèse finale de cette première édition de Bee Audacious a été dévoilée dans un amphithéâtre bondé de la Dominican University of California. La vidéo de cet événement ouvert au public est disponible sur le site internet de Bee Audacious (voir ci-dessous). Le rapport final est également téléchargeable ici. Bee Audacious 2016 aura donc été un succès, notamment à travers l’intense stimulation intellectuelle ressentie par chacun des participants, repartis chez eux avec beaucoup de nouvelles idées à mettre en place. L’événement a fait l’objet de plusieurs articles et comptes rendus de participants, essentiellement en anglais. Ce présent article est le premier texte public en langue française à ce jour. Par ailleurs, des interviews vidéo réalisées à cette occasion paraissent petit à petit, à mesure qu’avance le travail de montage et la collecte de fonds qui se poursuit pour les financer. Un documentaire est également en cours de réalisation à partir d’images tournées en décembre 2016.
Un an tout juste après, un nouveau site internet est en cours de finalisation (tenbytenplusten.com). Sa vocation sera de poursuivre le travail entrepris en décembre 2016 en lui donnant plus d’impact. L’argent collecté sur ce site internet sera dans un premier temps dédié à la restauration d’habitats respectueux pour les pollinisateurs. D’autres actions de plus grande ampleur suivront.
Enfin, l’organisation d’une nouvelle édition de Bee Audacious est en discussion actuellement. Outre un événement à part entière, ce genre de concept pourrait tout à fait venir se greffer en parallèle d’autres évènements apicoles.
Plus que jamais aujourd’hui, l’apiculture et les insectes pollinisateurs ont besoin d’une pensée audacieuse générée par un processus de dialogue. A quand un événement semblable pour les pays européens, ou francophones ? Un tel événement permettrait de réunir un monde scientifique, apicole et syndical morcelé tout en faisant émerger de nouvelles solutions adaptées au contexte des pays ou régions représentées.
Les premiers participants de l’édition 2016 de Bee Audacious, au Marconi Conference Center, Californie.
Compte-rendu final à la Domonican University of California, le 14/12/2016